La stérilisation d’une chienne consiste à empêcher la reproduction de celle-ci, soit de façon temporaire par un traitement médical (stérilisation chimique), soit de façon définitive par une intervention chirurgicale consistant en le retrait des ovaires voire de l’utérus. La stérilisation chirurgicale représente actuellement la pratique la plus courante, c’est pourquoi je la détaille tout particulièrement, mais vous pourrez retrouver la stérilisation chimique, ses avantages et ses inconvénients, en fin d’article.
Quelques rappels sur le cycle chez la chienne
Le cycle sexuel de la chienne se compose de quatre phases, caractérisées par un changement de comportement et une modification de l’appareil génital sous l’influence d’hormones sexuelles, les œstrogènes et la progestérone, produites au niveau des ovaires.
Les deux premières phases, appelées pro-œstrus et œstrus, correspondent aux chaleurs. Au cours du pro-œstrus qui dure en moyenne une semaine, la chienne se prépare à la reproduction : elle sécrète des phéromones qui attirent les mâles et perd du sang depuis la vulve. L’œstrus, qui dure de 3 à 10 jours selon les chiennes, correspond au moment de l’acceptation de l’accouplement et l’ovulation.
S’ensuit le post-œstrus, aussi appelé métœstrus ou diœstrus, qui dure 2 mois. S’il y a eu fécondation, cette période correspond à la gestation.
Enfin l’anœstrus est la phase de repos sexuel qui dure 4 à 5 mois.
Pour la majeure partie des chiennes, les chaleurs ont lieu deux fois par an, généralement au début du printemps et au début de l’automne. Cependant, certaines chiennes peuvent avoir une fois ou trois fois leurs chaleurs au cours de l’année. Ces variations ne sont pas anormales et dépendent de facteurs individuels et raciaux. Le plus important est de surveiller la régularité des cycles de votre chienne et d’en discuter avec votre vétérinaire.
La stérilisation chirurgicale
La stérilisation chirurgicale consiste à retirer soit uniquement les ovaires (ovariectomie), soit les ovaires et l’utérus (ovario-hystérectomie).
Pourquoi faire stériliser ma chienne ?
Diverses situations peuvent amener à envisager la stérilisation chirurgicale d’une chienne.
Dans un premier temps, la stérilisation permet d’éviter une gestation et de supprimer les chaleurs. Vous n’aurez ainsi plus de pertes sanguines, plus de fugues pour retrouver des mâles ni de gestation non désirée. La stérilisation a aussi l’avantage d’éviter la transmission d’affections héréditaires (exemple : dysplasie de la hanche).
A noter que l’influence de la stérilisation sur le comportement est variable : l’intervention va permettre de supprimer certains comportements sexuels (fugues, attrait des mâles) mais d’autres peuvent persister. Parlez-en avec votre vétérinaire pour évaluer les bénéfices dans le cas de votre chienne.
Dans un second temps, la stérilisation permet indirectement de prolonger la vie de votre chienne en prévenant l’apparition de certaines tumeurs sous l’influence des hormones sexuelles. La
prévention des tumeurs mammaires, tumeur la plus fréquente de la chienne dont la moitié est maligne, représente le bénéfice majeur de la stérilisation. D’autres tumeurs de l’appareil génital seront également évitées du fait de l’absence des ovaires, voire de l’utérus, mais il s’agit d’un bénéfice moindre puisque ces tumeurs sont plus rares.
La stérilisation peut également être envisagée pour des raisons médicales : les infections utérines, faisant suite à un déséquilibre hormonal après les chaleurs, ou les lactations de pseudogestation, plus couramment appelées grossesses nerveuses, se résolvent définitivement par la stérilisation. Il peut également être intéressant de stériliser une chienne diabétique, puisque lors du post-œstrus la progestérone peut aggraver le diabète sucré en agissant sur le métabolisme de la chienne.
Enfin, d’après l’article L211-14 sur la détention des chiens catégorisés, les chiennes de 1ère catégorie doivent être stérilisées. Le propriétaire risque jusqu’à 6 mois de prison et 15 000 euros d’amende si ce n’est pas le cas.
EN RÉSUMÉ :
La stérilisation chirurgicale de la chienne :
- provoque un arrêt définitif de la reproduction : plus de chaleurs ni de portées, avec modification partielle du comportement,
- permet une amélioration de la qualité de vie : diminution du risque de tumeurs (mammaires notamment), traitement et prévention de certaines affections (infections utérines, grossesses nerveuses, diabète sucré),
- est une obligation réglementaire pour les chiennes de 1ère catégorie.
Quels sont les inconvénients de la stérilisation ?
Le principal inconvénient de la stérilisation reste l’impossibilité de faire reproduire sa chienne, puisqu’il s’agit d’une intervention définitive. Cependant, contrairement à des idées reçues, la stérilisation n’est pas forcément signe de mal-être pour la chienne. Cela dépend beaucoup de facteurs individuels et de son mode de vie qui n’est pas toujours cohérent avec ses besoins de reproduction et qui par conséquent peut engendrer des frustrations.
Une des conséquences majeures de la stérilisation correspond à une prise de poids : en effet, l’intervention provoque des changements métaboliques, modifie la sensation de satiété et favorise le stockage des graisses. Ainsi, inévitablement, votre chienne va prendre un peu de poids. Il convient donc de prendre au sérieux le risque d’obésité, facteur favorisant et/ou aggravant de nombreuses maladies. Cependant, ce n’est pas forcément une fatalité, puisqu’un ajustement alimentaire par une réduction de la ration d’environ 30% et un suivi régulier (pesée une fois par mois pendant 1 an après la stérilisation par exemple) permettent de limiter une prise de poids excessive.
L’autre effet secondaire pouvant être observé est l’incontinence urinaire dans 5 à 10% des cas selon les études. Cela résulte d’une incapacité du sphincter urétral à contenir les urines, d’où apparition de gouttes d’urines voire de flaques généralement sur les lieux de couchage. Là encore, il ne s’agit pas d’une fatalité, puisqu’un traitement médical adapté permet une excellente réponse avec une suppression complète des fuites urinaires dans la majeure partie des cas.
Enfin, la stérilisation reste une intervention présentant des risques liés à l’acte chirurgical et à l’anesthésie. Lors de l’intervention, les principales complications graves restent les saignements, que le vétérinaire peut rapidement maîtriser, et l’accident anesthésique dont le risque est limité par une surveillance continue des constantes vitales. Après l’intervention, les complications potentiellement graves se résument à une déhiscence et/ou une infection de la plaie, dont le risque est limité par le maintien d’une plaie propre et le port de la collerette (cf plus loin). Il faut donc retenir que la stérilisation est une intervention réalisée quotidiennement et bien maîtrisée des vétérinaires, présentant un risque anesthésique d’autant plus faible que votre chienne est jeune et en pleine forme.
Quand faire stériliser ma chienne ?
La stérilisation de la chienne se fait généralement à la fin de la croissance, pendant la phase d’anœstrus. La croissance étant différente selon le format de votre chienne, l’âge recommandé de stérilisation peut varier de 4 à 12 mois, mais rien n’empêche de la stériliser après.
Afin de limiter le risque de tumeurs mammaires, la stérilisation est intéressante et a démontré ses bénéfices avant l’âge de deux ans. Cependant, une stérilisation même tardive limite les risques de récidives de tumeurs mammaires bénignes.
Enfin, le développement de l’appareil génital est aussi à prendre en compte : si la vulve est très peu développée ou si votre chienne présente une infection du vagin, il est préférable d’attendre les premières chaleurs pour la stériliser.
A noter que la stérilisation d’une chienne gestante est envisageable mais en tout début de gestation uniquement.
Comment bien préparer ma chienne ?
La stérilisation se réalise sur une chienne en bonne santé, afin de limiter les risques de complications liées à l’intervention : en effet, si votre chienne est malade, elle sera moins apte à supporter la chirurgie et l’anesthésie.
Pour l’intervention, la chienne doit être à jeûn, afin notamment de limiter les risques de fausse déglutition lors de l’anesthésie et de faciliter la chirurgie. L’alimentation et l’eau sont donc retirés la veille au soir de l’opération. Attention cependant, si votre chienne est jeune ou qu’elle a des traitements, cette mise à jeûn peut être différente : parlez-en avec votre vétérinaire.
Comment se déroule la stérilisation ?
Généralement, la pose d’un cathéter est recommandée car c’est une voie veineuse temporaire permettant l’injection des anesthésiques et des fluides hydratants pendant l’intervention. La zone opératoire correspond : soit à une zone partant du nombril jusqu’à l’intérieur des cuisses (ovariectomie par la ligne blanche), soit à une zone en arrière des côtes (ovariectomie par les flancs). La technique employée dépend du chirurgien et du gabarit de votre chienne.
Deux interventions sont ensuite possibles : soit le retrait uniquement des ovaires (ovariectomie), soit le retrait des ovaires et de l’utérus (ovario-hystérectomie). L’efficacité est équivalente dans les deux cas en terme de stérilité, le retrait de l’utérus ayant un intérêt lors d’infection avérée de l’utérus ou de la présence d’une gestation. Dans la plupart des cas chez la jeune chienne, l’ovariectomie est suffisante.
Le vétérinaire incise la peau et les muscles jusqu’à la cavité abdominale. Il identifie les ovaires puis ligature les vaisseaux afin de pouvoir retirer les ovaires sans saignement. Il referme ensuite l’abdomen et suture la plaie avec du fil, qui peut être résorbable ou non selon le chirurgien. La chienne est ensuite réveillée tranquillement, sous surveillance, et elle reçoit des anti-douleurs.
Quels sont les soins après l’intervention ?
Les soins post-opératoires se concentrent généralement sur une semaine après l’intervention. Le jour même, votre chienne sera certainement fatiguée. Si elle ne mange pas le soir, ne vous inquiétez pas, la forme et l’appétit reviennent normalement le lendemain.
Concernant les traitements, des anti-inflammatoires sont généralement administrés afin de limiter la douleur au niveau de la plaie.
Au niveau local, une plaie avec une bonne évolution devient étanche sous 48 heures. Ainsi, la surveillance de la plaie est particulièrement importante dans ce laps de temps. Afin de limiter les risques d’infection et de déhiscence des sutures, des dispositifs empêchant la chienne de lécher la plaie sont instaurés jusqu’au retrait des fils (s’il s’agit de fils irrésorbables). Généralement, cela se présente sous forme d’une collerette ou d’un vêtement protégeant la plaie.
La stérilisation chimique
On dispose également de traitements médicaux permettant une stérilisation temporaire et réversible d’une chienne. Ce sont essentiellement des progestatifs à longue durée d’action sous forme de comprimés ou d’injections qui sont à renouveler avant chaque nouveau cycle.
Le principal avantage de la stérilisation chimique réside dans son caractère réversible : on peut ainsi contrôler les gestations de la chienne sans supprimer l’éventualité de la faire reproduire.
Cependant, ces traitements présentent à plus ou moins long terme de nombreux effets secondaires ayant des répercussions majeures sur la santé de la chienne : prise de poids, diabète, infection de l’utérus, tumeur mammaire… En tant que propriétaire, vous devez aussi prendre des précautions quant à l’administration du traitement, puisqu’il s’agit d’hormones pouvant perturber la fertilité. Ces traitements sont donc aujourd’hui à proscrire mais le vétérinaire est assez démuni puisqu’aucun médicament ne permet à ce jour d’induire une infertilité temporaire sans risque chez la chienne.
Conclusion
En résumé, la stérilisation chirurgicale présente de réels atouts pour la santé de votre chienne et se réalise quotidiennement par les vétérinaires. Il s’agit donc d’une intervention bien maîtrisée, modérément invasive et avec un bon contrôle de la douleur. Les conditions nécessaires au bon déroulement de la chirurgie sont une chienne à jeûn, en phase d’anœstrus et en bonne santé. Les soins post-opératoires sont essentiels et chronophages sur une semaine, avec l’administration de traitements anti-inflammatoires et une surveillance de la plaie et de l’état général. Enfin, n’hésitez pas à discuter avec votre vétérinaire pour évaluer les bénéfices et les risques dans le cas de votre chienne.
Remerciements au Dr Emilie ROSSET, vétérinaire spécialiste en reproduction animale (Dipl. ECAR) exerçant au CERREC (Centre d’Étude et de Recherche en Reproduction et Élevage des Carnivores) de Vetagrosup (Campus vétérinaire à Marcy l’étoile), pour la relecture de cet article.