TTPLC : Comment savoir si mon chien est en surpoids ?
Dre Maud Clavel (MC) : Pour savoir si son chien est en surpoids, la première des choses à faire est de le peser. Mais le poids n'est pas le reflet de la silhouette du chien car le muscle et le gras n’ont pas le même volume à poids égal !
Évaluer le surpoids d’un chien, ce n'est pas simplement se baser sur le chiffre que nous donne la balance !
Ce qui est surtout important dans l’évaluation du surpoids, ce n’est pas tellement la valeur chiffrée que donne balance, mais ce qu'on appelle l'évaluation nutritionnelle.
Elle permet d’évaluer à la fois :
- l’importance de la masse grasse au moyen d’une échelle de score corporel, qui ne peut se faire que par un examen clinique et une palpation de différentes régions du corps pour savoir où se situe le tissu graisseux en trop. L’échelle est très visuelle et n’est pas seulement réservée au vétérinaire. Elle peut être utilisée aussi par le propriétaire de l’animal pour se rendre compte de l’état d’embonpoint de l’animal.
- l’évaluation de la masse maigre. Lorsque l’on a un chien très musclé, il peut peser le même poids qu’un chien moins musclé et plus gras.
TTPLC : Quels sont les chiens les plus à risque de surpoids ? Et pour quelles raisons ?
MC : Il y a des races qui sont génétiquement prédisposées au surpoids. C’est notamment le cas des Retriever, des Bergers Australiens, les Cavaliers King Charles, les Beagle ou bien encore des races brachycéphales (bouledogues français, bouledogue américain…).
Pour certaine race le surpoids est considéré comme un critère de beauté. Attention le surpoids et l’obésité sont des maladies. Cependant, ce n’est pas une fatalité : le fait de ne pas suralimenter son chien et d’avoir un chien actif, le protège de l’obésité et cela, même chez une race prédisposée au surpoids.
Mais, il y a aussi un effet « profil du propriétaire ».
Quand on a un Border Collie, c’est rare que les propriétaires soient des personnes de 85 ans qui vivent au 17ème étage d’un immeuble. Les propriétaires sont généralement des personnes plus sportives et plus jeunes qui vont sortir davantage le chien, ce qui fait le chien aura moins tendance à l’embonpoint.
Le lien que le propriétaire entretient avec son animal joue aussi pour beaucoup. Quand le chien est considéré comme un membre de la famille, leurs propriétaires veulent lui faire plaisir : la nourriture joue un rôle important dans l’affectif. Or, un excès d’aliments et de friandises peut aussi faire le lit de l’obésité.
La stérilisation réduit également de 20% le besoin énergétique du chien si bien que les chiens stérilisés sont aussi davantage prédisposés au surpoids. Mais attention, la stérilisation réduit seulement le besoin en énergie mais pas les autres besoins nutritionnels.
Un chien à risque peut aussi être le chien qui est en convalescence après une opération du ligament croisé et qui ne peut plus bouger pendant 1 à 2 mois, le chien de chasse pendant les mois où il ne chasse pas, les chiens de travail mis à la retraite, le chien dont le propriétaire est malade et qui ne sort plus…en un mot, tous les facteurs qui peuvent réduire le niveau d’activité du chien – lié au chien en lui-même ou à son environnement de vie – sont aussi des facteurs de risque de surpoids.
TTPLC : Mon chien est en surpoids : qu’est-ce qu’il risque ?
MC : Le surpoids fait diminuer l’espérance de vie du chien jusqu’à 2 ans.
Il a aussi un impact sur la qualité de vie du chien. Il peut :
- aggraver les troubles cardio-respiratoires et locomoteurs,
- favoriser l’apparition de diabète,
- augmenter les risques anesthésiques puisque plus l’animal est en surpoids plus les doses d’anesthésiques sont importantes et plus l’animal met de temps à se réveiller,
- augmenter le risque de pathologies tumorales,
- prédisposer à toutes les maladies inflammatoires,
- aggraver les maladies infectieuses (état d’inflammation permanent),
- augmenter davantage le risque de survenue des affections pour lesquelles une race est déjà prédisposée. C’est le cas par exemple de la hernie discale chez les chiens prédisposés comme le Bouledogue Français en appliquant des contraintes mécaniques supplémentaires sur la colonne vertébrale, de la cardiopathie chez le Cavalier King Charles, des ronflements chez le Bouledogue Français, de l’arthrose chez le Labrador etc.
TTPLC : Comment faire maigrir son chien ?
MC : Le surpoids résulte d’une balance énergétique avec, d’un côté, les apports énergétiques (apport d’énergie par l’alimentation) et de l’autre côté, les dépenses énergétiques. Quand un animal ingurgite trop d’énergie par rapport à ce qu’il dépense, la balance est positive et il prend du poids.
Pour agir sur le surpoids, il faut donc agir sur les 2 côtés de la balance : la prise en charge nutritionnelle et l’augmentation de la dépense énergétique.
La prise en charge nutritionnelle consiste à diminuer les apports énergétiques de l’animal. Pour ces chiens, il ne suffit pas de réduire la quantité de croquettes. Si cela diminue bien les apports caloriques, cela diminue aussi le volume de la ration et les apports en protéines, en acides gras essentiels, en vitamines et en oligo-éléments ! Il faut donc alors forcément changer d’aliment pour avoir la même quantité de nutriments sans avoir les calories qui vont avec !
Dès l’instant qu’on doit revoir à la baisse la quantité de croquettes, c’est qu’il faut changer d’aliment…si tant est que la dose que le chien recevait au départ était la bonne.
Il faut aussi penser à toutes les autres sources alimentaires que peut recevoir le chien en dehors de sa ration. Cela peut être la nourriture du chat de la maison, les friandises, les restes de table, la poubelle, les vacances chez Mamy, les lamelles à mâcher qui ne sont souvent pas considérées comme des friandises mais comme des produits d’hygiène bucco-dentaire et qui sont pourtant une source non négligeable de calories, d’autant plus chez les animaux de petit gabarit. Il arrive que la part de l’aliment qui constitue le repas du chien ne soit pas la plus importante. Si on ne gère que cette partie et qu’on ne tient pas compte du reste, on va forcément vers un échec de la prise en charge du surpoids.
Le coaching et le suivi des propriétaires par le vétérinaire sont donc très importants dans la réussite ! Si on achète des plats Weight Watchers et qu’on mange des M&M’s dans son canapé à côté, on ne risque pas de maigrir ! Pour le chien, c’est pareil. La prise en charge doit être globale et pas seulement focalisée sur le repas du chien.
Du côté des dépenses énergétiques, il faut motiver l’animal à bouger davantage au quotidien (en prenant l’escalier avec lui, en allant chercher le pain avec son chien…) et en réintroduisant de l’exercice physique (promenade, course, faire du vélo avec son chien…). Le vétérinaire va évaluer l’activité physique du chien au départ et donner des préconisations pour l’augmenter de façon progressive. Le tout est de trouver des solutions qui sont compatibles avec le quotidien et les capacités du propriétaire de l’animal.
Manger moins, bouger plus…ça marche aussi pour les chiens !
TTPLC : En combien de temps peut on espérer faire maigrir son chien ?
MC : Chez le chien, on peut tabler sur 1 à 3% de perte de poids par semaine. Si on se base sur 1%, cela signifie qu’il faudra 30 semaines à un chien qui a 30% de surpoids pour revenir à son poids normal. La perte de poids est assez longue, d’où l’intérêt du suivi par un vétérinaire sur cette durée. Son rôle est de maintenir la motivation du propriétaire, de répondre à ses questions, à ses problématiques, d’expliquer ses échecs…pendant ce long parcours.
TTPLC : En réduisant l’apport calorique du chien, ne risque-t-il pas d’avoir faim ? Que faire le cas échéant ?
MC : Réduire l’apport énergétique de l’animal, ce n’est pas réduire le volume d’aliment ! C’est pour cette raison qu’il faut passer sur un aliment qui a une densité énergétique plus basse (c’est-à-dire qui contient moins de calories pour 100g), ce qui permet d’en donner plus ou au moins autant qu’avant ! Pour conserver ou augmenter le volume de la ration, on peut aussi ajouter des courgettes ou des haricots verts. Ils apportent des fibres qui, en plus de l’effet « volume », diminuent la digestibilité de l’aliment.
La satiété vient avec la distension de l’estomac. Une grande quantité d’aliments ou de fibres va donc apporter une sensation de satiété mais il ne faut pas oublier qu’elle passe aussi par la couverture des besoins en protéines qui ont un rôle satiétogène chez le chien.
On a dit pendant longtemps que pour faire maigrir un chien, il fallait lui donner moins de croquettes. Se faisant, on va lui donner moins de calories…mais le seul souci, c’est qu’il y a aussi moins d’apport d’autres nutriments et en particulier de protéines qui sont satiétogènes chez le chien. Du coup, comme le chien ne couvre pas ses besoins en protéines, il a tout le temps faim. Si on lui donne d’autres aliments qui ne couvrent pas ce besoin en protéines, il va continuer à chercher à manger en permanence sans jamais être rassasié.
Il faut aussi être conscient qu’à chaque fois que l'animal demande une interaction avec son propriétaire, il n'a pas forcément faim ! Certaines personnes ont en effet une mauvaise compréhension du comportement de l’animal. Le chien peut venir au contact de son propriétaire dans la cuisine pour avoir une caresse ou pour jouer mais pas forcément pour manger. Or, souvent les propriétaires répondent en lui donnant quelque chose à manger. Si le chien est gourmand, il va accepter cette nourriture et va recommencer à solliciter son propriétaire pour qu’il réponde à sa demande. La sensation de faim est souvent mal interprétée !
TTPLC : Quelles sont les meilleures croquettes pour faire maigrir son chien ? Quelles sont leurs particularités ?
MC : De bonnes croquettes de régime, ce sont des croquettes pauvres en calories. Pour être hypocaloriques, elles doivent avoir une teneur modérée en lipides et être pauvres en glucides. En effet, on ne peut pas donner « zéro gras » au chien au risque de le carencer en acides gras essentiels. Elles doivent aussi être riches en protéines car les protéines sont satiétogènes et permettent de préserver la masse musculaire de l’animal. Leur richesse en fibres devra dépendre du profil de l’animal. Plus les croquettes seront riches en fibres, plus leur densité énergétique sera basse et plus grandes sont les quantités que l’on pourra distribuer à son animal, ce qui permettra de satisfaire sa satiété par un plus grand volume d’aliment.
L’autre solution consiste à donner une alimentation humide avec les mêmes caractéristiques nutritionnelles car ces aliments contiennent 80% d’eau et on a donc un volume d’aliment beaucoup plus important.
TTPLC : On a vu que l’accompagnement par un vétérinaire est important dans le cadre d’un régime pour déterminer le nouvel aliment et sa nouvelle dose d’aliment…mais est-ce la seule raison ?
MC : L’accompagnement par un vétérinaire est aussi important pour garder la motivation de propriétaires, pour assurer le suivi du poids de l’animal, poser les bonnes questions afin de guider au mieux les propriétaires, les accompagner sur le choix des friandises les plus adaptées d’un point de vue nutritionnel, donner des conseils d’exercice physique en fonction de la saison, donner des astuces applicables au quotidien, pour mettre en évidence des améliorations-santé chez le chien etc.
Par exemple, pour un chien qui doit être gardé chez « papy-mamy », on peut conseiller de préparer à l’avance un Tupperware par jour avec la bonne dose quotidienne de croquettes pour éviter les erreurs de dosage et une boîte de friandises par jour dans lequel on peut piocher sans se tromper.
TTPLC : Parlez-nous du challenge poids-santé Virbac. En quoi peut-il aider les propriétaires d’animaux ?
MC : Le challenge poids-santé Virbac se passe à la fois chez le vétérinaire et sur Facebook.
Au cabinet, il permet de programmer le suivi de l’animal et surtout de maintenir la motivation du propriétaire. C’est lui seul qui est le garant de la réussite de la perte de poids de son chien. C’est lui qui doit être vigilant sur les doses d’alimentation, la valeur nutritionnelle des friandises et le fait de sortir et de faire bouger le chien.
Le groupe Facebook que j’animerai permet de donner des conseils à tous les propriétaires qui souhaitent s’engager dans une démarche de perte de poids chez leur animal et de garder le lien avec un vétérinaire pendant tout ce temps. Les membres du groupe pourront poster des photos avant-après, échanger sur les problématiques qu’ils rencontrent et des astuces pour fabriquer des friandises allégées, maintenir une activité physique etc.
L’objectif est d’être à l’écoute des problématiques que les propriétaires peuvent rencontrer et de leur apporter des solutions adaptées à leur environnement et à leur quotidien. Il permettra à tous les propriétaires de chien « au régime » à se sentir moins seuls dans cette longue démarche.
Rejoignez la communauté !
Posez vos questions à Maud Clavel, sur le Groupe Facebook Challenge poids-santé Virbac.
- Propos recueillis par Guylaine Vandekerkhove -